dimanche 29 mai 2016

Un Printemps arabe

Le Printemps arabe fait florès au Moyen-Orient, libérant les aspirations d'expression des citoyens dans cette région du monde.
En Syrie, le régime de Bachar Al Assad est à son apogée et prépare les festivités honorant le Guide syrien et sa politique.
Or la révolte gronde au sein des quartiers de Damas, sous le regard des observateurs de l'ONU. De l'Université, le mouvement gagne peu à peu toutes les couches de la population, même le camp de réfugiés palestiniens s'ébroue et se réveille.
Les répliques militaires sont sans pitié: arrestations aveugles, négation du libre-arbitre de la population, disparitions soudaines entretiennent l'emprise d'un pouvoir de plus en plus contesté.
Les lucarnes sur le monde extérieur que sont la télévision et internet sont autant de graines libertaires semées dans les foyers.
Cependant la tradition est bien ancrée: Karim et Fatima s'aiment depuis toujours mais la jeune fille est promise en mariage à un proche du clan Al Assad. La position d'étudiant de Karim ne pèse pas lourd face au faste d'une belle situation. Le proche du pouvoir est un homme bouffi d'importance, d'orgueil et de mépris pour ses semblables. 
L'union est fêtée, la séparation de Karim et Fatima consommée, chacun partant de son côté, résigné.
Leur histoire d'amour est celle d'un Roméo et d'une Juliette que les détours macabres du destin réuniront dans la douleur. Karim lutte contre le régime sanguinaire de Bachar tandis que Fatima est contrainte à l'épouser. 

La révolte gronde donc, lentement mais sûrement, dans les quartiers de Damas, les opposants s'organisent pour manifester puis, quand le ton va crescendo, pour monter des opérations de guérilla urbaine.
Des officiers du régime désertent pour rejoindre les rangs des insurgés, dont le frère aîné de Karim qui prendra le commandement du réseau de résistance du quartier.
Malgré la présence d'observateurs de l'ONU, les mouvements de résistance ne reçoivent guère d'aide et ne doivent compter que sur eux-mêmes. L'Occident, prompt à se mêler de tout au Moyen-Orient, est subitement muet en Syrie malgré les preuves tangibles des exactions commises par le Bachar Al Assad. Seulement, ce dernier a le soutien des Russes: la Syrie devient une ligne de partage d'influence.

Insidieusement, la dimension religieuse prend une place dans le mouvement révolutionnaire. La mosquée devient un lieu d'échanges, un lieu de débats et d'organisation des actions à mener. Jusqu'au jour où le massacre, par le régime de Bachar, perpétré lors de la prière du vendredi offrira une occasion inespérée à quelques religieux d'asseoir une emprise sur la Révolution.

Karim et Fatima se retrouvent au cours de l'été 2013: la Révolution est en marche, Bachar et son régime perdent du terrain. Fatima, mère de jumeaux, a perdu son époux dans les combats et demande asile à sa famille qui l'éconduit comme si elle était une pestiférée. Pourtant, c'est elle qui jeté en pâture Fatima au proche de Bachar. 
Karim l'accueille à bras ouverts, sans jugement car toujours amoureux. Ils s'aimeront enfin, se goûteront de toute leur âme et de tout leur corps. Tout est bien qui finit bien? En Syrie, il ne peut avoir de "happy end": une nuit, une blanche étreinte aura raison de leur bonheur fragile.

"La Dame de Damas" raconte en images, fortes et sensibles, le déchirement d'un pays soumis à un régime implacable, autiste, au coeur d'enjeux géo-politiques dépassant l'entendement d'une population qui ne vit que dans la crainte et l'horreur.
L'horreur des combats fratricides, l'horreur des trahisons, des reniements. Il n'y a plus de limite imposée aux souffrances d'un peuple que l'on n'entend pas à l'échelle mondiale. Il est observé, analysé mais aidé? Non, loin de là. D'ailleurs, quand Bachar orchestrera le bombardement de quartiers où les rebelles ne tiennent aucune position, le sommet de l'ignominie sera atteint: quand le pouvoir, qu'il soit militaire ou civil, en vient à exterminer sa population en usant d'armes chimiques, sans qu'une seule protestation officielle ne s'élève, pourquoi s'étonner de l'entrée en scène d'une rébellion religieuse! 
Ainsi, la mort blanche dispensée à des quartiers de Damas, ouvrira-t-elle la porte à un Jihad qui reprendra à son compte l'élan révolutionnaire.

"La Dame de Damas", par ses planches aux couleurs sépia, est une oeuvre qui touche, qui émeut, révolte et permet de saisir une partie de l'échiquier politique qui défraie les chroniques depuis trois ans. Derrière la violence au quotidien, il y a la vie, la mort, la liberté et l'amour. Vie, liberté et amour, concept qu'aucune dictature ne peut ôter de l'âme des hommes et femmes refusant le joug qu'on leur impose.

Une lecture qui ne laisse pas indifférent, loin s'en faut.

Quelques planches




Aucun commentaire: